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Le Vide ou le moment interstitiel
par Au Fil du Temps








La connaissance de la loi du changement et de la discontinuité porte à réfléchir sur l'instant qui lie deux phénomènes et à ses conséquences concrètes sur le comportement. " L'espace entre Ciel et Terre, c'est comme un soufflet de forge ! Il est vide, mais ne tarit pas ; en mouvement, il ne cesse de produire " (Lao tse).


De même entre deux pensées, entre une expiration et une inspiration, une action et une réaction, se trouve un " vide ", un moment interstitiel appelé dans le bouddhisme indien et le Védenta " Vide de Turya ". Le vide qui apparaît entre deux images d'un mouvement décomposé d'une séquence filmée, est une expression simple de la discontinuité universelle.







Mais pour saisir ce " vide " à " l'instant juste ", posséder une " juste vue " et " laisser agir ", il est absolument nécessaire d'éliminer toute agitation mentale. Dans l'action tourbillonnante propre du combat, la vision des partenaires devient différente de celle que procure le déplacement linéaire. Certes le pratiquant " libéré " pense, mais ses pensées et ses visions ne sont plus complices d'un désir de durée. Elles disparaissent lorsque cessent les circonstances qui les ont engendrées, et ne laissent aucun " résidu ".


Telle est la conception de la délivrance de la loi de cause à effet, et de l'asservissement. Alors et seulement s'éveille et s'acquiert un comportement différent ! Cette découverte se trouve intimement liée à la maîtrise du Centre, ce que précise : " Les trente rais d'une roue ont en commun un seul moyeu : or c'est là où il n'y a rien (dans le creux) que réside l'efficacité du char. On façonne l'argile en forme de vase : or c'est là où il n'y a rien que réside l'efficacité du vase.







Ainsi, nous croyons bénéficier des choses sensibles (yeou : le visible et le palpable), mais c'est là où nous n'apercevons rien (wou : le vide) que réside l'efficacité véritable (Lao-tse). Le " vide " n'est autre chose que le Wou, l'absence de qualités sensibles qui caractérise le Tao.


Ce Vide est efficace parce qu'il est comme le soufflet capable de produire du souffle à volonté... Le " Vide " est efficace encore parce que, comme le moyeu, ou le vase, il est un réceptacle. L'image des trente rayons qui convergent vers le vide du moyeu est fréquemment utilisée pour symboliser la vertu du chef qui attire à lui tous les êtres, l'Unité souveraine qui ordonne autour d'elle la multiplicité. Cette image peut encore évoquer le Taoïste qui, lorsqu'il est vide, c'est-à-dire purifié des passions et des désirs, se trouve totalement imprégné du Tao ou comme l'exprime Ho-chang-kong, " habité par les esprits vitaux qui animent le corps ".







En ce qui nous concerne, l'éveil spirituel se traduit par un sentiment de vide, qui est une forme très profonde de communion avec le Tout. Seul le " Vide " autorise le " sen-no-sen ", l'action au juste instant, le moment interstitiel, ce qui confirme : " Celui qui pourrait faire de soi-même un vide dans lequel les autres pénétreraient librement, deviendraient maître de toutes les situations. " (Lao-tse).






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