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La Tradition de l'Ecole Yang
Par Jean Gortais

TaiJi Quan / édition Le courrier du Livre



SENTIR LE MOUVEMENT

Chaque mouvement naît, se développe, décline et n'est pas séparé de celui qui le précède ni de celui qui le suit; il est partie intégrante d'un mouvement plus vaste qui se déploie sans rupture, tel un flot continu. La pratique du Tàiji quân permet de percevoir et d'équilibrer notre dynamisme vital intérieur et extérieur. Elle nous met en relation avec le grand cycle de la vie et nous aide à conduire l'énergie sans effort dans la stabilité. Le premier mouvement que réalise un débutant contient déjà toute la pratique. C'est pourquoi sentir le mouvement ne dépend pas simplement de la difficulté technique de l'exercice. C'est un état d'attention, d'ouverture et de calme. La constance de la pratique développe cette présence à soi-même Sur la base des principes du Tàiji, la technique apparaît non pas une recherche de performance mais devient, au contraire, le support qui permet de développer la stabilité, d'enrichir la créativité, de s'ouvrir plus largement à soi-même aux autres, à l'espace.



ENTRE TERRE ET CIEL

L'homme est en mouvement entre terre et ciel. La marche en est l'exemple le plus simple et le plus évident. La pratique du Tàiji quàn réalise une union entre le haut et le bas; elle relie notre aspiration vers le ciel et notre enracinement dans la terre. Par la présence de la souplesse et de la stabilité, le mouvement peut alors être à la fois ouvert, ferme et mobile. De là naît la vraie fluidité dans laquelle la légèreté n'est pas flottement et l'enracinement n'est pas lourdeur. Privée de ses racines, une plante ne peut grandir; privée de la lumière, elle ne peut s'épanouir.



Tung Ying Chieh




LA RENCONTRE AVEC L'EXERCICE

Le sens de l'exercice n'est pas la réalisation rigide, automatique d'un geste ou d'une posture déjà connus, mais le développement, à travers la pratique, d'une sensibilité nouvelle en relation avec l'espace et l'énergie cosmique. Le cœur de l'exercice est chaleur, écoute dans la stabilité, silence dans le mouvement. Etre présent dans les postures, dans les gestes des différents exercices du Tàiji quân, il n'y a pas autre chose à chercher. Extérieurement le mouvement est sans rupture. Intérieurement son goût devient plein et ouvert à l'espace. Ce goût ne peut être saisi, il apparaît avec la pratique et résonne au-delà de la pratique. Cela demande de l'attention.



LA SENSIBILITÉ ET LA TECHNIQUE

Devenir de plus en plus sensible dans le mouvement ne signifie pas s'y diluer sans racines. Devenir de plus en plus précis dans la technique ne signifie pas devenir technicien. La pratique, au sens noble du terme, n'est pas simplement l'apprentissage d'une forme particulière de mouvement; c'est aussi une perception sensible et ouverte de l'énergie et de l'espace. Il arrive que, dans la pratique, on ait l'impression de gagner en sensibilité et de lâcher un peu la technique ou bien de gagner en précision et d'être moins sensible. Mais la pratique bien sentie unit ces deux pâles. Il s'agit progressivement de devenir un avec la technique. Etre la technique, au sens profond, c'est être présent, c'est sentir, c'est s'oublier dans le mouvement. Alors le Tàiji est un art et une méditation.



L'ÉCOUTE DU SILENCE

L'attention silencieuse éveille un sentiment de présence dans la pratique. Ce silence n'est pas simplement celui que procure un endroit calme. C'est un silence intérieur où l'activité mentale s'apaise pour s'ouvrir à la perception sensible du ici et maintenant. Dans l'expérience consciente de la posture et du geste silencieux se découvre alors l'union de l'immobilité et du mouvement.



Tung Hu Ling




LE CHANT DES TREIZE GESTES

Le chant des treize gestes est un texte traditionnel chinois sur le Tàiji quân.


II importe de ne pas négliger les treize gestes.
La commande de l'intention prend sa source dans la taille.
On porte attention au changement et à la rotation du vide et du plein.
Le souffle circule dans tout le corps sans la moindre interruption.
Dans le calme, on se met en mouvement et, dans le mouvement, on demeure calme.
Selon le changement de l'adversaire, se révèle le mouvement merveilleux.
Avec le cœur, dans tous les gestes, on emploie l'intention.
On l'obtient et on ne le trouve pas difficile.
On porte attention, chaque instant, à la taille.
Le souffle se vaporise lorsque le ventre se détend complètement.
Quand le coccyx est au milieu, l'esprit peut parvenir au sommet.
Tout le corps est habile et la tête est suspendue.
On cherche minutieusement avec le cœur.
Se rassembler et se déployer, ouvrir et fermer s'effectuent librement.
Passer le seuil et guider le chemin se réalisent oralement.
Le Gongfu est sans limite; la méthode se pratique.
Si on parle des principes et de la pratique, quel est le but ?
L'intention et le souffle sont le roi; les os et la chair sont les ministres.
Si on demande: pourquoi a-t-on l'intention de pratiquer ainsi ?
C'est afin de bénéficier de la longévité, de durer sans vieillir, comme au printemps.
Ce chant, ce chant contient cent quarante mots.
Chaque mot est vrai, précis et le sens est complet.
Si on ne cherche pas et n'étudie pas cela,
On gaspille le temps et c'est regrettable.



Tung Kai Ying


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