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Une conception globale de l'être humain
Selon le Dr Paul Carton, l'Hippocrate du 20è siècle
Prises de vues Marie Noelle Louvard / Kérala Inde








Pour s'occuper de malades, les soigner et les conseiller, il est absolument indispensable d'avoir une connaissance exacte de l'être humain. Il faut comprendre son fonctionnement normal et pathologique; et quelles influences le mode de vie, les médications et les soins produisent sur lui. Ceci n'est possible que si l'on a une image claire et complète de sa constitution. De cette manière seulement, les forces mises en jeu par le praticien lors des traitements le seront utilement et en connaissance de cause. Sinon, le thérapeute serait dans la même situation que celui qui prendrait place au volant d'une voiture sans en connaître le fonctionnement, qui ne saurait pas si en manoeuvrant, il va avancer ou reculer, freiner ou accélérer, tourner ou avancer en ligne droite.


Très vite, le Dr Carton s'est rendu compte que ne considérer que le corps physique - selon la vision matérialiste "l'homme n'est que son corps" - ne suffisait pas pour comprendre l'être humain et pour servir de guide à la thérapeutique; que les connaissances anatomiques et physiologiques traditionnelles, bien que réelles et justes en soi, ne couvraient qu'une partie de la connaissance de l'homme.


Sans tomber dans le mysticisme ou l'occultisme, mais en puisant dans les écrits des "pères de la médecine", le Dr Carton redécouvrit une conception de l'homme qui tenait compte aussi bien de sa nature matérielle qu'immatérielle, conception qui correspondait d'ailleurs à celle enseignée par les grandes religions. Elle était la seule qui permettait d'intégrer en un tout logique et clair tous les phénomènes reliés à l'être humain.


Paul Carton résumait ainsi cette conception : "La constitution de l'homme est à la fois triple et une. L'organisme n'est pas fait que de chair matérielle. Un potentiel de vitalité anime l'économie. Il sert d'instrument à l'esprit pour agir sur le corps physique.


Le groupement de ces trois forces, spirituelle, vitale et matérielle, en une unité de conscience constitue... l'individu". Il y a donc trois éléments: le corps physique, la force vitale et l'esprit. Le corps ne fonctionne, c'est-à-dire n'est en vie que s'il est animé par la force vitale. A eux deux, ils forment l'outil pour l'activité de l'esprit. Ils ne sont donc pas l'être réel, mais seulement son instrument. Le "moi" proprement dit de l'être humain est l'esprit. Reprenons ces trois éléments séparément et voyons ensuite quelques conséquences qui découlent de cette approche.





Le corps physique :


Le corps physique est évidemment la notion la plus aisée à saisir. Personne ne doute qu'il ait un corps. C'est une donnée visible, stable, constante dans le temps, sur laquelle on croit pouvoir s'appuyer. En réalité, notre corps est en constant changement et renouvellement. Ce ne sont jamais les mêmes substances qui le composent. Il a été calculé qu'au bout de sept années, tous les matériaux dont nous étions construits ont été remplacés par des nouveaux.


Pourtant, nous conservons notre forme corporelle, nous demeurons parfaitement reconnaissables avec toutes nos caractéristiques physiques: forme du corps, traits du visage, stature, silhouette. Comment est-ce possible? Qu'est ce qui fait que notre corps conserve son aspect et son unité dans le temps? La réponse se trouve dans le deuxième élément de la constitution de l'être humain: la force vitale.





La force vitale :


A elle seule, la matière n'est pas capable de s'organiser en un tout ordonné, comme l'est le corps humain. Une force organisatrice et coordinatrice est ici nécessaire. C'est la force vitale qui remplit ce rôle. Précisons tout de suite que cette force est immatérielle. Elle ne peut donc être vue, pesée, disséquée ou analysée, comme peut l'être la matière physique. Hippocrate disait déjà d'elle: "La force vitale est la plus puissante force de cohésion et d'action de tout ce qui existe. Cependant, elle est invisible à l'œil, seul le raisonnement peut la concevoir."


La force vitale remplit de multiples tâches. Elle est une force constructrice et ordonnatrice qui organise les matériaux physiques, suivant un plan architectural propre à l'espèce humaine en général et à chaque esprit en particulier. C'est donc elle qui construit l'édifice corporel et qui le conserve dans le temps. Elle est une sorte de corps subtil, faisant office de modèle ou de moule. C'est grâce à son action que l'ovule, une fois fécondé, la multiplication cellulaire dans "l'embryon" ne se fait pas de manière indifférenciée, mais que des tissus différents se développent et que ceux-ci sont placés à des endroits précis pour former les organes. Le rôle de "moule" est aussi celui de surveiller que la multiplication des cellules ne dépasse pas les limites des organes et du corps, que ceux-ci acquièrent leur forme et la gardent.


Lorsque la force vitale disparaît, la force de cohésion du corps disparaît aussi. La matière dont le corps était formé se désorganise et ne peut plus résister comme un tout ordonné, ou comme une unité, face aux attaques microbiennes. Le corps se décompose, la mort s'ensuit.



La force vitale est aussi une force motrice qui anime et dirige tous les rouages de la vie organique. C'est elle qui fait fonctionner le coeur, les poumons, ... pour qu'ils accomplissent leur travail. Elle synchronise, orchestre et harmonise d'ailleurs toutes les différentes activités physiologiques pour maintenir notre corps dans un équilibre biologique le plus harmonieux possible, c'est-à-dire en santé. La force vitale agit de jour et de nuit, lorsque nous sommes actifs ou au repos, conscients ou inconscients. En cas de blessure suite à un accident, la force vitale agit comme une force réparatrice et fait l'impossible pour restaurer les tissus endommagés en cicatrisant les plaies et en ressoudant les os. Lors d'agressions par des microbes ou des virus, ou lorsque des poisons ou des substances toxiques pénètrent dans le corps, la force vitale se manifeste comme une force défensive. Elle lutte pour la survie de l'organisme en déclenchant les systèmes d'alarme, puis en mettant en état d'alerte et en organisant les défenses organiques (leucocytose, système immunitaire).


La force vitale est aussi une force médicatrice, car non seulement elle maintient le corps en vie, mais elle cherche à le ramener vers la santé en cas de maladie. Lorsque la force vitale devient médicatrice, elle agit par les mêmes moyens qu'en temps normal, mais d'une manière plus intense, rapide, exubérante, voire violente: éliminations accrues pour libérer le corps des toxines (diarrhée, catarrhes des voies respiratoires, forte sudation); augmentation de tous les métabolismes pour neutraliser et se débarrasser de poisons ou de microbes (fièvre); envie prononcée de certains aliments pour combler les carences; production accrue de globules blancs pour faire face à une infection; anorexie et aboulie des malades pour favoriser le repos et la régénération organique.


La force vitale ayant pour rôle d'animer et de garder le corps en vie, elle ne peut jamais travailler contre lui ou en opposition avec les lois physiologiques. Il y aurait une contradiction si elle pouvait travailler en même temps pour et contre la vie. Les moyens qu'elle met en oeuvre pour guérir et conserver le malade en vie sont donc toujours effectués de manière intelligente et salutaire.



Le Dr Carton, comme Hippocrate, considérait le rôle du médecin comme un rôle "d'interprète et de ministre" de la force médicatrice. Le médecin doit recevoir des enseignements de la force vitale en observant la manière dont elle agit - le rôle d'interprète - et l'aider à accomplir son travail - rôle de ministre - par les médicaments et soins qu'il peut prodiguer.


En méditant sur les propriétés de la force vitale et sur son mode d'action, on voit qu'elle ne veut que le bien de l'organisme. Si le corps est malade, ce ne peut pas être la faute de la force vitale ni celle du corps, mais bien celle de celui qui utilise le corps comme un outil: l'esprit, c'est-à-dire nous.




L'esprit :


Si la force vitale est immatérielle, l'esprit (ou l'âme) l'est à plus forte raison. L'esprit est notre moi véritable. Il ne doit pas être confondu avec le cerveau, parce qu'étant immatériel, il ne peut être identifié avec un organe du corps physique. L'esprit ne fait que de se servir du cerveau comme d'un instrument, pour recevoir les informations sur le corps et sur le milieu extérieur et pour agir sur eux.


La conscience que nous avons de nous-mêmes comme individus différents des autres, notre capacité de décider et notre volonté plus ou moins forte pour mener jusqu'au bout ces décisions, résident dans l'esprit. Les caractéristiques de l'esprit - nos traits de caractère- sont le résultat de toutes les expériences vécues, des pensées et aspirations que nous entretenons, des efforts déployés pour développer telle ou telle faculté ou vertu en nous.




L'esprit est le centre de notre être entier. Il dirige et la force vitale et le corps. Il est le "je" qui dit: j'ai un corps (et non pas je suis un corps). De lui et de ses décisions quant à la manière de diriger son mode de vie, c'est-à-dire son outil, dépendra la santé ou les maladies de celui-ci. En effet, si la force vitale travaille constamment à conserver le corps en bonne santé, elle ne peut le faire qu'en fonction des situations plus ou moins favorables dans lesquelles l'esprit la place. Ces situations seront physiologiques ou non, suivant que le milieu de vie est harmonieux ou agité, pollué ou pur; l'alimentation adéquate ou non; que des intoxicants ou drogues seront pris ou non; que les pensées seront positives ou non.




Importance de la distinction esprit - force vitale - corps :


L'être humain est constitué de trois éléments différents qui sont toutefois étroitement liés. Ce lien est si fort que la majorité des gens ne les distinguent même plus. Or, cette union produit une étroite interdépendance des trois éléments. L'esprit peut, par exemple, décider de vivre de manière déraisonnable en "brûlant la chandelle par les deux bouts". Le résultat en sera qu'il épuisera ses forces vitales. Si la mauvaise direction est empruntée trop longtemps, le corps en pâtira, car la force vitale ne pourra plus l'entretenir correctement. A l'opposé, si le corps ne reçoit pas les substances nutritives qui lui sont nécessaires (alimentation carencée, régimes extrêmes), les forces vitales ne seront pas entretenues par la vitalité des aliments et elles déclineront. A son tour, l'esprit en sera affecté, car il n'aura plus un outil adéquat pour agir efficacement.



La thérapeutique doit absolument tenir compte des trois niveaux ou des trois éléments de la constitution de l'être humain et connaître leurs influences réciproques. La dépression nerveuse, par exemple, peut être causée soit par des carences au niveau physique (carences en magnésium, vitamines B...), soit par un épuisement des forces vitales (mode de vie trop stressant, manque de sommeil), soit encore par une philosophie erronée de l'esprit (pensées négatives).


Par respect pour le malade et par souci d'efficacité, il faudrait éviter de prescrire une psychanalyse alors que la dépression est due à des carences minérales dont devrait s'occuper un nutritionniste, ou d'intoxiquer un malade avec des médicaments psychotropes alors qu'un temps de repos s'avère nécessaire.


Ne pas tenir compte de la constitution triple de l'être humain ne peut qu'engendrer une vision fausse de la réalité et des moyens à utiliser. En négligeant de prendre en considération la force vitale, différente chez chacun, on abandonne la notion de tempérament si importante pour individualiser les traitements. En effet, chacun ne peut réagir qu'avec ses propres forces, et le dosage des médicaments doit tenir compte des forces de réaction des malades, et non seulement de leur poids et âge. Une même dose peut être idéale pour un malade, beaucoup trop élevée pour un deuxième et ainsi le mettre en état de choc, alors que pour un troisième malade, elle est trop faible et donc inefficace.


Ne pas tenir compte de la force vitale et de son action bénéfique pour rétablir la santé conduit à ne considérer les manifestations de la maladie que comme des troubles morbides à combattre, et non pas comme des réactions défensives. La thérapeutique sera alors agressive, répressive et destructrice. Elle attaquera les effets et non les causes. Au lieu d'être un soutien aux moyens curatifs mis en place par la force vitale, elle s'y opposera. Cette manière d'agir va directement à l'encontre du précepte d'Hippocrate qui dit: "C'est la nature (la force vitale) qui guérit la maladie, la médecine est l'art d'imiter les procédés curatifs de la nature".



Ce n'est pas une perte de temps et d'énergie de considérer également l'esprit, puisque - à cause de la place prépondérante qu'il occupe- il est le plus souvent le premier responsable des problèmes de santé. En effet, le non-respect du corps et de ses impératifs physiologiques sont dus avant tout à un manque de connaissances et de conscience, à des faiblesses de caractère et à un manque de volonté de la part de l'esprit. En niant son existence immatérielle, distincte du corps et le dirigeant, et en le rabaissant au rôle d'un simple organe, le cerveau, on nie du même coup sa responsabilité.


Le cerveau, comme chaque organe, peut être influencé par l'action des médicaments. Une médicalisation de tous les problèmes existentiels et sociaux s'ensuit. On croit pouvoir tout expliquer par des déficiences physiologiques et les résoudre par l'emploi de remèdes pharmaceutiques connus ou à découvrir. Le malade, dans tout cela, est considéré comme n'étant ni responsable, ni capable. Il n'est pas un esprit qui apprend et évolue à "l'école de la vie", il est un malade qui doit recevoir un traitement. Le "malade" se laisse alors "prendre en charge", il croit que c'est une affaire de spécialiste. Il ne réalise plus qu'il lui incombe de se prendre en main, de corriger ses faiblesses de caractère, de changer son approche de la vie, et surtout de changer son état d'esprit.



Dans sa pratique médicale, le Dr Carton considérait toujours ses malades dans leur constitution triple. Agissant aux trois niveaux, il accordait autant d'importance au respect des lois physiologiques, vitales que spirituelles, pour le plus grand bien des traitements et des malades.



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