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Les règles générales des mutations
(Variations, caractère cyclique du Yin et du Yang)
par Antoine Ly


L'art du Taï Ji Quan, le Dao et le Qi / Editions Lierre et Coudrier
Illustrations d'Anaïs , Elodie, Khamidah et Noémie Kerroux




1) La relativité réciproque du yin et du yang :


Yin et yang sont deux mots complémentaires. En soi, ils ne représentent absolument rien de fixe, mais ne sont que les deux aspects relatifs de toute chose. Dès lors, l'utilisation des principes yin et yang est extrêmement fluctuante ; de plus, ceux-ci reposent sur une base matérielle très large.

Par exemple, on dit que sont relatifs le ciel et la terre, le soleil et la lune, le jour et la nuit, le vent et la pluie, etc. ; l'espace et le temps, le devant et le derrière, le haut et le bas, la gauche et la droite, ce qui est carré et ce qui est rond, le passé et le futur. Pour l'humanité, sont relatifs l'ordre et le désordre, l'abondance et la disette, l'union et la désunion, les Occidentaux et les Orientaux, le seigneur et le vassal, le fonctionnaire et le peuple, le parti majoritaire et le parti minoritaire (ou le parti d'opposition), le gouvernement et le peuple. Dans la société, sont relatifs le père et la mère, l'homme et la femme, le mari et l'épouse, le fils et la fille, l'adulte et l'enfant, la vie et la mort, la bonne santé et la maladie, l'employeur et l'employé. En Chine, sont relatifs le confucianisme et le taoïsme ; dans le tai ji quan, sont relatifs le vide et le plein, le déploiement et le repli, l'inspiration et l'expiration, le fléchissement et l'allongement. En diététique, sont relatifs l'aigre et le salé, le chaud et le sec et le froid et l'humide, l'animal et le végétal. Enfin sont relatifs l'être et le non-être, le bien et le mal, le beau et le laid, les pleurs et les rires.

On distingue en tout quatre états : le froid, le chaud, le tiède et le frais ; le chaud et le tiède sont yang, le froid et le frais sont yin. On distingue cinq saveurs : le pimenté, le sucré, l'amer, l'aigre et le salé ; de ces cinq saveurs, le pimenté et le sucré se diluent en yang, tandis que l'amer et l'aigre se diluent en yin ; le salé est également yin, et l'on parle d'une sixième saveur, l'insipide, qui serait yang.

La théorie de la médecine chinoise traditionnelle repose complètement sur le principe du yin et du yang et sur celui des cinq éléments (eau, feu, bois, métal, terre). Que ce soit pour la biologie, la pathologie, la pharmacologie, le diagnostic, le traitement, la prévention, on ne peut rien faire si l'on s'écarte de cette pensée fondamentale. Les médecins de l'antiquité ont largement expliqué l'utilisation du yin et du yang dans la médecine, ainsi que les principes mêmes de cette médecine. Aujourd'hui encore, les médecins pratiquant la médecine chinoise traditionnelle utilisent en toute chose le principe du yin et du yang. Par exemple, pour ce qui est de l'anatomie humaine, la tête est yang, les pieds sont yin, le dos est yang, le ventre est yin, l'extérieur du corps est yang, l'intérieur est yin. Pour ce qui est des organes internes, les cinq viscères (cœur, foie, poumons, rate, reins) sont yin ; les six réceptacles (vésicule biliaire, estomac, intestin grêle, gros intestin, vessie et triple réchauffeur : orifice supérieur de l'estomac, cavité supérieure de l'estomac, orifice supérieur de la vessie) sont yang. Pour ce qui est des capacités et de la substance visible de l'homme, tout ce qui est mouvement, capacité, tout ce qui est sans forme est du domaine du souffle vital, et appartient au domaine du yang ; au contraire, tout ce qui est corporel physique, tout ce qui est matière est du domaine de la matérialité et appartient au domaine du yin.

Si l'on développe cette règle de relativité du yin et du yang on peut dire que tout ce qui est mouvement, stimulation, clarté, extérieur, tout ce qui s'élève, ce qui s'avance tout ce qui est gazeux, informel, tout ce qui est faculté, chaleur, lumière, force, tout ce qui est positif est yang. A l'inverse, tout ce qui a une forme, ce qui est fait de matière, le froid, ce qui est sombre, souple, négatif on peut dire que tout cela est yin. Les domaines d'application du yin et du yang sont donc extrêmement vastes ; enfin, les deux aspects relatifs de toute chose peuvent être expliqués par ce principe.





2) Caractères indissociables du yin et du yang :


Bien que yin et yang aient chacun leur particularité la base de leur relativité réside en ce qu'ils sont à la fois en harmonie et uniforme. Pour prendre un exemple, l'estomac a une matérialité, on peut donc dire qu'il est yin ; mais le mouvement de digestion est un phénomène (une capacité) immatériel, et peut donc être qualifié de yang. Il en est ainsi parce que les aspects complémentaires de l'appareil digestif coexistent : si l'estomac, objet matériel, donc yin, n'avait pas la capacité yang du mouvement de digestion, il perdrait sa raison d'être qui est de digérer ; à l'inverse, si l'estomac perdait sa matérialité, la capacité de digestion ne saurait où se loger et n'existerait pas. On peut donc dire que la matérialité (yin) et la fonction (yang) de l'estomac sont à la fois complémentaires et indissociables.





3) L'alternance du yin et du yang :


Nous l'avons déjà dit, le yin et le yang recouvrent toute chose ; de plus tout se développe et se transforme sans cesse. Dès lors, yin et yang ne peuvent que suivre le développement et le changement de toute chose, et se développent et se transforment eux-mêmes.

Mais leur particularité réside en ce que, dans leur opposition fondamentale, ils se développent, diminuent ou augmentent l'un par rapport à l'autre. Prenons l'exemple de l'alternance du yin et du yang dans la nature : l'eau coulant sur le sol est yin ; sous l'effet de la chaleur du ciel, qui est yang, elle s'évapore, elle devient alors yang - l'eau est devenue gaz, vapeur d'eau - et se rassemble dans le ciel pour former les nuages. En revanche, si l'air chaud - la vapeur d'eau, le nuage - yang, rencontre une masse d'air froid, yin, de yang l'eau repasse à un état yin, puisque la vapeur d'eau se transforme à nouveau en pluie. Cet exemple illustre l'alternance du yin et du yang ; du yang naît le yin, du yin naît le yang.

Les principes yin et yang agissent l'un sur l'autre par complémentarité, croissent et décroissent l'un par rapport à l'autre en alternant. Ce double principe de complémentarité et d'alternance du yin et du yang, les hommes de l'antiquité l'appelaient "l'origine réciproque du yin et du yang". Autrement dit : le yin naît du yang, lequel se fonde dans le yin.





4) L'équilibre relatif du yin et du yang :


La base de l'alternance du yin et du yang est dans leur équilibre réciproque. En biologie humaine, ce n'est que lorsque yin et yang sont en équilibre que l'on est en bonne santé. Bien sûr, lors des divers stades de croissance et de déclin du yin et du yang, il peut y avoir des moments de déséquilibre relatif. Si, lorsqu'ils évoluent, yin et yang ne peuvent parvenir à un équilibre, on assiste alors à un réchauffement, chez l'humain, des organes yang, et à un refroidissement des organes yin.

Si le yang finit par prendre le dessus, on arrive à une maladie chaude, qui se caractérise par un besoin de froid (yin), un désir de boire, la constipation, un épaississement des urines, un énervement, des yeux exorbités, un besoin de mouvement, de parler, une respiration lourde et un pouls instable avec une tendance à l'accélération ; tous ces symptômes sont des symptômes yang.

Si au contraire le yin prend le dessus, c'est une maladie de caractère froid, donc yin, qui se caractérise par un refroidissement du corps et des quatre membres, un besoin de chaleur, de la soif, des diarrhées, les urines claires, l'envie de fermer les yeux, de rester silencieux, une respiration faible, un pouls faible.

L'utilisation du yin et du yang pour guérir les maladies repose sur le fait qu'une maladie yin provient d'un manque de yang, une maladie yang d'un manque de yin ; retrouver l'équilibre entre yin et yang, c'est recouvrer la santé. La règle générale du yin et du yang est celle du mouvement et du développement perpétuel des choses, parce que toute chose revêt deux aspects complémentaires, ce qui induit la règle de relativité du yin et du yang ; comme toute chose comprend deux aspects intimement liés l'un à l'autre, cela induit la règle de complémentarité du yin et du yang ; comme toute chose revêt deux éléments opposés et réciproquement liés, et qu'il existe une sorte d'"inter-promotion" des deux aspects, ces relations de mouvement, de développement relatif induisent la règle d'alternance de la croissance et la décroissance du yin et du yang ; le résultat du développement des choses étant la préservation de l'équilibre réciproque, cela induit la règle de l'équilibre réciproque du yin et du yang.

Les relations entre yin et yang obéissent à d'autres principes. Parmi les choses représentées soit par le yin, soit par le yang, il n'en est pas qui restent yin sans jamais devenir yang, ou qui demeurent yang sans jamais devenir yin. Par exemple, le plus petit est yin si on le considère par rapport au plus grand, mais il devient yang s'il est considéré par rapport à un plus petit encore, il n'y a donc pas d'opposition totale entre yin et yang.

Dans les relations yin-yang, on parle encore du principe selon lequel : "il y a du yang dans le yin, et du yin dans le yang" ; c'est pourquoi, lorsque l'on représente graphiquement le taiji, on dessine un point blanc dans la partie noire, et un point noir dans la partie blanche. Ainsi, dans l'hiver froid, et yin, le printemps yang commence déjà à se développer, les racines des végétaux enfouis sous la terre se déploient déjà et, dès que le printemps arrive, les végétaux surgissent de terre et prennent place dans le paysage printanier. Dans la lumière se cache l'obscurité, et dans l'obscurité point la lumière.




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